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C'est des tonnes de mels qui me demandent où j'en suis et si j'y vois mieux, auxquels je ne réponds pas, et pour cause: Piponin a 15 ans. Je rappelle qu'il avait à peine un an cet été encore juste avant sa mort, notre déménagement, ma solitude, mes problèmes de vue et sa vie d'objet décoratif sous la plante du salon.

Pour résumer, mon voile blanc s'est désépaissi en quelques jours vers fin octobre et des voix ont commencé de m'arriver dans les oreilles que j'ai clairement perçues comme étant celles de mon épouse et d'un jeune homme. Plutôt sourdes au début, comme venant de derrière un mur, je m'y suis accoutumé et j'ai fini au bout d'une petite heure par comprendre ce qu'elles se disaient: ma femme demandait son nom à l'ado qui répondait Mais c'est moi, Piponin, puisque je te dis que c'est moi avec des larmes dans sa voix grave.
Elle demandait ce qui avait bien pu se passer et le soi-disant Piponin pleurait qu'il n'y pouvait rien, que papa passait son temps à marcher à tâtons et à faire semblant de ne rien entendre et que l'appartement était fermé de l'intérieur sans moyen de mettre la main sur la clef. C'est là que j'ai commencé à enfin tout voir et qu'il m'a fallu accepter tant bien que mal que je faisais face à ma femme et à mon fils qui faisait la même taille que moi.
Depuis on a dû lui racheter des vêtements, un lit, des livres de son âge et l'inscrire en seconde au lycée Camus où il a l'air de suivre malgré des difficultés en latin. J'ai eu la curiosité un jour au déjeuner de passer le morceau de Bach qui le dégelait lors de ses premières crises de tétanie, il l'a fredonné comme s'il le connaissait par coeur mais aucun souvenir précis n'a l'air attaché à la mélodie.
C'est tout ça, et surtout la difficulté à affronter ce qui s'en est suivi, qui fait que je n'ai pas pris le temps de mettre ce blog à jour.